Il est à noter à ce sujet que certaines écoles yogiques issues pour la plupart de traditions remontant aux premiers commentateurs des Yoga Sutras de Patanjali ( vers 200 ans +JC) préconisent de pratiquer ces techniques successivement, c'est à dire les unes après les autres après acquisition de chacune : d'abord les postures, puis le pranayama, puis pratyahara,.... (en considérant cette optique, il faudrait alors d'abord maîtriser les règles de conduite avant de commencer à pratiquer les asanas, ce qui en laisserait très peu aptes à se mettre à la pratique des asanas ! :-) LOL ) Il apparait que cette voie est attribuable à une erreur de traduction/compréhension du texte sanscrit tel que le constatent certains érudits en sanscrit comme Michel Angot (" Le Yoga-Sutra de Patanjali " Ed. Les Belles Lettres, 2008 ). C'est d'ailleurs par la pratique que l'on vérifie des bienfaits et de l'efficacité de les associer entre elles car elles se complètent, s'interpénètrent les unes les autres. Les 8 membres (ashtanga) sont bien des membres, des parties d'un tout et non des étapes successives et linéaires tel que le raisonne le mental.

astanga

 

 

Yama : règles de conduite sociale (non nuisance, honnêteté,ne pas voler, modération, non convoitise)

Niyama : règles de conduite personnelle (pureté, contentement, ardeur disciplinaire, étude de soi, confiance au Divin)

Asana : la posture

Pranayama : la respiration

Pratyahara : le retrait des sens

Dharana : la concentration

Dhyana : la méditation, concentration "sans effort", fusion de l'objet et du sujet

Samadhi : la contemplation, l'absorption dans le Tout au delà de la lumière, du son et de la vibration

 

 

 

Accorder un peu de temps à méditer (se détacher des fluctuations du mental/ego et observer en témoin ) dans l'immobilité du corps apporte beaucoup à la pratique des asanas car l'assouplisement du mental assouplit le corps. Et la pratique des asanas en s'enrichissant du calme mental amène l'immobilité posturale. Ceci est d'autant plus important pour les Occidentaux qui sont trop dans le faire et pas assez dans l'être ( savoir ne rien faire pour un occidental est presque impossible, c'est pourtant parfois la chose la plus sage à faire !).

La méditation est incontournable, au sens où elle permet de devenir observateur du fonctionnement de notre personnalité, notre psyché et ainsi d'avoir prise sur ce fonctionnement pour libérer, changer ou améliorer ce qui dans ce fonctionnement provoque des souffrances devenues insupportables. "Le sens des souffrances est de permettre l'accession à un ordre spirituel et à des forces supérieures qui vous libèrent de celles qui ont provoqué ces souffrances" G.Dürckheim. Celà ne peut s'obtenir par la pratique des asanas seules. L'introspection fait partie intégrante de la pratique yogique, qui est une psychologie de longue date (cf. Les "Yoga Sutras" de Patanjali, IIème siècle). Par ailleurs, le mental est un état de conscience qui peut être géré par un état de conscience au dessus de lui. Il est nécessaire de donner au mental la place qui lui revient et non pas de le laisser diriger notre vie. Le mental n'est pas fait pour penser par lui-même, "s'inspirer de lui-même", il sert à recevoir et mettre en pensées les intuitions provenant de la conscience supérieure. Les difficultés et problèmes viennent du fait que le mental cherche à penser à partir de lui-même, dans l'ego. Arrêter le fonctionnement des pensées ou du moins les tenir à distance sans s'y laisser emporter, c'est mettre le mental en silence ou au second plan, et le mental fait tout pour empêcher ça car de ce fait il perd le pouvoir auquel il tient tant; c'est la raison pour laquelle la méditation fait peur car on craint de ne plus exister avec l'arrêt des pensées et celà est ce que le mental fait croire pour rester au pouvoir ! :-)

" La méditation est cet état de concentration parfaite où l'esprit est entièrement calme et à l'abri de toute fluctuation, semblable à une flamme qui brûle sans vaciller. C'est le flux libre et ininterrompu de la pensée tournée dans une seule direction, centrée sur un sujet bien défini. La méditation purifie l'être intérieur, son mental et chasse toutes les forces inconscientes qui s'opposent au fonctionnement unitaire de la personnalité. Au début, la méditation peut être quelque peu diffuse et verbale et reposer sur une forme et des idées associées. Au fur et à mesure qu'elle s'approfondit, nous allons au-delà de tous les mots, de toutes les formes et de notre sentiment de l'ego. L'une après l'autre, les couches de notre conscience commencent à s'ouvrir à notre vision, jusqu'à ce que nous soyons enfin établis dans la pure connaissance de l'esprit. Alors nous abandonnons, naturellement, toutes nos pensées verbales du divin pour ne nous identifier qu'avec les pures sensations non verbales de l'extase. Tout le monde peut et doit pratiquer la méditation au cours de sa vie quotidienne. C'est une pratique particulièrement bénéfique dans la société moderne où des activités harassantes et des distractions sans fin nous écartent constamment des vérités fondamentales. La méditation nous permet d'observer la vie et ses activités avec détachement, de telle sorte que nous pouvons comprendre les choses dans leur juste perspective. Elle équillibre et clarifie notre vision et ouvre la porte aux perceptions subtiles qui changent nos convictions et notre caractère. En plus de ses bienfaits spirituels, la méditation a un effet tonique sur notre santé. Elle calme nos émotions et purifie nos nerfs. En la pratiquant, nous détendons complètement notre corps, apaisons notre esprit, et nous réfléchissons calmement sur nous-mêmes en tant que centre actif du divin. Nous nous offrons , coeur et âme, au principe cosmique créateur. La méditation est un acte de consécration au but cosmique de l'existence. Au cours de la méditation, quels que soient nos désirs, nos pensées, nos impulsions, nos sensations ou nos souvenirs, il nous faut les observer, en faire une analyse patiente, les comprendre, les offrir au divin, afin qu'ils puissent être canalisés vers le but final de la vie, c'est à dire l'illumination spirituelle. Au sixième chapitre de la "Bhagavad Gîta", Krishna déclare : "Parmi tous les chercheurs spirituels, ceux qui pratiquent la méditation me sont les plus chers." Aussi presse-t-il Arjuna, son disciple, de suivre cette voie. Après avoir écouté Krishna, Arjuna sécrie, en proie à un grand désespoir : "Je ne vois pas comment atteindre cet état suprême de méditation, mon esprit est si agité et obstiné. Maîtriser l'esprit me semble aussi difficile que maîtriser le vent." Alors le seigneur Krishna répond : " Sans doute, l'esprit est sans cesse en mouvement et il n'est pas facile de le soumettre. Mais il peut être maîtrisé par la pratique et le détachement." Ainsi, par la pratique répétée de la concentration et par le détachement des sens, l'esprit est contrôlé et les vagues de désir sont contenues. L'esprit est alors dirigé vers l'être intérieur et se trouve rattaché à l'âme universelle. Les termes de détachement et de renoncement ne signifient pas qu'il faille absolument s'éloigner de la société et du monde qui nous entourent. Le détachement est une attitude mûre de l'esprit qui reconnaît la plénitude de la vie dans la libération du joug de toutes les illusions. C'est l'apprentissage d'une attitude réaliste face à la vie et au monde et ce n'est pas la négation de l'expérience, mais l'abandon d'une servitude, causée par l'ignorance. Selon le yoga, le détachement concerne le bien suprême de l'humanité. Ce n'est ni une absorption égoïste en son propre ego ni une indifférence envers autrui ou l'humanité. Le non-attachement signifie le détachement mental du désir de posséder et, par dessus tout, de l'orgueil et de l'ego. Pour arriver à cela, il faut avoir le sens du discernement, qui seul détruit l'ignorance. Sans celui-ci, il ne peut y avoir de véritable détachement et sans détachement il ne peut y avoir de progrès dans la méditation. Toute agitation de l'esprit doit être maîtrisée et contenue par une puissante force de la volonté. Pour habituer son esprit à rester calme, d'humeur égale et paisible, il faut orienter sa volonté vers un détachement progressif des objets des sens et des biens temporels. Un proverbe dit : "Ceux qui ne se détachent pas des biens temporels seront toujours tourmentés par eux." Nous ne devons pas nous identifier avec notre corps, mais avec notre âme qui est le centre de notre conscience. Il faut se rappeler que l'âme est d'essence divine et ce n'est qu'en purifiant l'âme par la pratique du renoncement que le divin peut se manifester en nous. La première phase de la méditation consiste à empêcher l'esprit de se disperser et à éliminer toute distraction en se détachant des objets des sens. Il faut parvenir à un flux continu de la pensée dans une seule direction. Par une volonté sans faille et une pratique régulière, on parvient au résultat désiré. La deuxième phase très importante est l'introspection. En sondant les profondeurs de sa propre personnalité, l'esprit subconscient est de plus en plus activé. Par le pouvoir de discernement, on parvient à ordonner sa vie intérieure et à chasser de l'esprit tous les éléments perturbateurs. En dirigeant son esprit à l'intérieur de soi, on acquiert du discernement et, par le discernement, on trouve la Vérité. La phase suivant consiste à se détacher complètement de la partie extérieure de la perception, pour ne méditer que sur la partie intérieure, sur la signification de l'objet de manière à ne faire qu'un avec lui. Quand la méditation atteint son sommet, l'étincelle divine dans l'homme s'éveille complètement. Il faut se rappeler que la réalisation du Soi par la méditation est le but ultime du yoga. Plus on est sincère, en s'offrant soi-même au Divin, plus on devient réceptif à son égard. Plus on est purifié dans son coeur par l'ardent désir d'atteindre le but, plus on s'élève au-dessus de l'influence corruptrice des forces négatives. Et, quand le terrain a été bien préparé, que le coeur a été purifié et que la vision de la vérité nous a été révélée, nous sommes pénétrés par la Grâce divine. On demandera : "Comment est-il possible de connaître la nature la plus intime d'un objet, si notre esprit se fond en lui au cours de la méditation ?" Les expériences des yogis prouvent que la disparition apparente de la conscience de soi signifie réellement la dissolution du rapport sujet-objet et leur fusion dans la conscience. Au cours d'une méditation profonde sur un objet, nous pouvons arriver à nous identifier totalement à lui, en n'ayant plus conscience ni de son nom ni de sa forme. Cette faculté d'identification nous permet de saisir la réalité cachée derrière cet objet, son esssence propre. A ce moment-là, le connaisseur, la connaissance et le connu ne font qu'un. La phase finale de la méditation est appelée Samadhi par les Hindous, Nirvana par les Boudhistes, Satori par les adeptes du Zen, l'Union mystique par les Chrétiens. Tous sont d'accord pour admettre que cet état de Supra-conscience est le couronnement de tous les efforts spirituels de l'homme." Extrait de l'ouvrage de Sri Ananda, "Yoga, comment éveiller et développer nos forces latentes".

 

JNANA YOGA

BAKTI YOGA

KARMA YOGA

 

 

Il est évidemment difficile de véritablement méditer, c'est pour cela que des techniques d'approche ont été mise au point pour s'entraîner, de la même façon que l'on s'entraîne à approcher les postures dans leur essence (le vide).

De plus pratiquer seulement les asanas ou pratiquer seulement la méditation entraîne des déséquilibres physiques, émotionnels et psychiques : la méditation seule perd la vitalité physique, et dans la pratique physique seule, l'énergie développée n'est pas canalisée ou elle alimente seulement les premiers chakras et l'ego (de plus la musculature de l'ossature doit juste servir à tenir le squelette dans une tension/détente subtilement accordée; elle n'est pas faite pour être développée, sinon ça développe l'ego; l'ego et le muscle vont ensemble, c'est une des raisons pour lesquelles les yogis évitent de se nourrir de viande).

Le Hatha Yoga, yoga de la technique le plus connu, qui est souvent apparenté aux postures, à une pratique physique , est beaucoup plus que cela : "Les textes classiques tels que "Hatha Yoga Pradipika" et "Gheranda Samhita" sont tantriques et enseignent non seulement les asanas mais toute une série de méthodes tantriques de purification, de mantras et de méditations (...) Les personnes pratiquant des asanas quotidiennement peuvent les pratiquer de façon imparfaite. Les asanas effectuées vigoureusement ou centrées sur l'objectif final au lieu d'être concentré sur le processus et qui en plus demandent de placer le corps dans des postures idéales non naturelles, peuvent provoquer des tensions ou des lésions. Les asanas qui se pratiquent sans cultiver le détachement, même s'ils sont une aide physiquement, peuvent conduire à une fixation accrue sur le corps ainsi qu'à une rigidité mentale et émotionnelle (...) Le fait d'accorder trop d'importance aux asanas est négatif. Cela peut augmenter la conscience du corps et accroître l'ego physique. Si nous voulons vraiment pénétrer à l'intérieur du système complet du yoga, le temps passé à pratiquer des asanas ne doit pas remplacer celui passé à effectuer des pratiques plus approfondies de pranayama, de mantras et de méditation." Dr David Frawley, "Yoga et Ayurveda"

Il s'agit donc de trouver l'équilibre entre l'esprit de l'Orient et l'esprit de l'Occident, entre le passif et l'actif, le mental et le physique, ida et pingala,... :-)

En ce sens, utilisé dans son ensemble en pratiquant tous les membres (asthanga) avec tempérance, le Yoga est un merveilleux moyen de travailler sur toutes les couches de l'être -car il les intègre toutes, des plus denses aux plus subtiles via la Source- de les conscientiser et les équilibrer.

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